À l’hôpital de La Rochelle, Dr. Delphine Danais, médecin-anesthésiste, Delphine Arquis, cadre de santé au sein du service de pédiatrie et Valérie Panier, sage-femme coordinatrice du Pôle Femme Enfants, forment un trio de choc au service de l’association « Colore Mon Hôpital », soutenue par l’APPA.
Celle-ci a pour ambition d’améliorer le quotidien des jeunes patients hospitalisés grâce à des animations ludiques et colorées, basées notamment sur la réalité augmentée. Nous les avons rencontrées pour leur poser un trio de questions…
Quelles sont les principales missions de « Colore mon hôpital » ?
[Delphine Danais] L’association a été fondée à l’été 2017 pour améliorer la prise en charge des jeunes patients au bloc opératoire. Nous avons créé une tablette en réalité augmentée avec deux personnages principaux, Crapoto et Peluchon, qui accompagnent les enfants pour se rendre au bloc opératoire sans stress et sans prémédication. Ils deviennent ainsi acteurs de l’anesthésie grâce à la possibilité d’échanger avec les personnages, ce qui leur permet de comprendre ce qui va arriver…
[Valérie Panier] Nous avons choisi la réalité augmentée pour créer un univers rassurant. Elle a en effet l’avantage de ne pas isoler l’enfant, contrairement à la réalité virtuelle avec le casque. La tablette permet d’articuler l’accompagnement des petits personnages et le soutien du personnel soignant, sans toutefois remplacer les médecins.
[Delphine Danais] Il est prouvé scientifiquement que le fait de ne pas pré-médiquer un enfant entraîne moins de consommation d’antalgiques, notamment morphiniques, en salle de réveil. L’enfant se réveille plus vite et on évite ainsi les risques d’effets secondaires des médicaments (nausée, vomissement, détresse respiratoire, retard de la reprise du transit, etc).
[Delphine Danais] À la sortie de l’opération, nous offrons à chaque enfant une peluche qui correspond à l’emblème de la Charente Maritime, un âne en culotte rouge ou bleue. Cette dimension locale est importante à l’image des engagements de l’association en faveur du développement durable et de l’économie circulaire. Depuis 2017, par exemple, nous avons mis au point une filière pour recycler le matériel jetable du bloc, comme les lames de laryngoscope ou les câbles de bistouris électriques, en collaboration avec une entreprise locale spécialisée dans le réemploi du métal.
« Colore mon hôpital » semble en effet très attachée à son empreinte locale…
[Valérie Panier] Oui cela est très important dans notre projet, à tous les niveaux. Pour créer le dispositif, nous avons contacté un auteur de la région, Luc Turian, qui nous a « prêté » ses personnages, Crapoto et Peluchon ; ils sont issus d’une série de livres pour enfants qui voyagent dans la région au gré de leurs aventures. Pour le développement du logiciel de réalité augmentée, nous avons collaboré avec une société informatique rochelaise, Serious Frames. Et c’est un éleveur du Poitou qui nous vend les peluches offertes aux enfants en salle de réveil…
Quels sont les autres projets développés par l’association ?
[Delphine Danais] La mission première de l’association concerne les publics jeunes mais, au fil des années, nous avons élargi progressivement ses champs d’intervention vers de nouvelles activités et en direction des adultes, en particulier auprès des personnes âgées. « Colore mon hôpital » intervient ainsi aujourd’hui sur des projets variés qui ont toujours pour vocation de « soulager » le passage au bloc. Par exemple, nous avons installé des enceintes qui diffusent de la musique apaisante et sont plébiscitées par les patients avant d’entrer dans la salle d’opération.
[Delphine Arquis] Nous intervenons également dans d’autres espaces de l’hôpital. L’association a par exemple participé à la décoration du service de pédopsychiatrie, en collaboration avec un artiste qui est venu peindre sur les murs. D’autres services ont également été décorés à travers différents procédés, comme l’utilisation de grands stickers : ce fut le cas en pédiatrie et c’est en cours pour le service de radiologie. Pour les personnes âgées, nous avons souscrit un abonnement au quotidien régional et fait l’acquisition de livres en gros caractères… Nous travaillons également sur un autre projet avec la tablette en réalité augmentée, qui cible d’abord les enfants mais que l’on espère aussi intéressant et déclinable, à terme, pour les adultes et les personnes âgées : l’idée est d’utiliser la technologie pour permettre de s’évader, par exemple en projetant des images de nature ou en faisant apparaître des papillons sur le bras… L’enjeu est toujours le même : détendre l’utilisateur et détourner son attention des réflexes de peur.
[Delphine Danais] Nous aimerions également acquérir un casque en réalité virtuelle, plutôt pour les adolescent(e)s et les adultes en attente d’interventions d’anesthésie loco-régionale, afin de leur faire passer le temps et de les rendre plus zen…
[Delphine Arquis] De façon générale, le but de l’association est d’essayer d’améliorer le confort de l’hospitalisation, pour tous, à travers une approche un peu globale du soin et une dimension très locale, basée sur le terrain. Quand on a des patients apaisés, c’est une vraie source de confort pour les soignants et donc un grand bénéfice pour tout le monde !
Pour aller plus loin, découvrez un autre interview, vidéo cette fois, de Colore mon hôpital en cliquant sur ce lien.